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  • Polar : l'oeuvre de Bret Easton Ellis

    Après avoir parlé des imitations de Bret Easton Ellis , il était largement temps que j’évoque le Maître. Disons-le tout de suite : je n’aime plus ce qu’Ellis est devenu depuis Glamorama. Son dernier roman, Lunar Park, m’a beaucoup déçue : on a vraiment l’impression qu’il « fait du Ellis » (personnages vides, qui ne croient en rien, ne ressentent aucune émotion véritable). Sans compter la pathétique imitation de Stephen King dans la seconde partie du roman.

    Pourtant, Ellis mérite le plus grand respect : quand on a écrit « American Psycho », on peut se reposer jusqu’à la fin de ses jours. Patrick Bateman est devenu un archétype, un personnage tellement parfait qu’il prend une dimension universelle. Contrairement à la plupart des gens autour de lui, Bateman a une vie intérieure, des pensées interdites, des actes inacceptables : tout son personnage tient dans l’écart entre son « moi social » et son « moi destructif » (pour paraphraser Proust)

    Dans  « The bonfire of vanities », Tom Wolfe avait déjà essayé de créer un personnage de yuppie complètement amoral: mais Sherman n’est pas Bateman. Il lui manque une dimension de souffrance, de profonde horreur de son milieu.

    Comme tout chef d’œuvre, « American Psycho » a donné lieu à différentes interprétations : Bateman aurait imaginé tous ses crimes, ce qui explique qu’il ne soit jamais sérieusement menacé par la police.

    Ellis a probablement pensé à cette hypothèse en écrivant le roman : ses éditeurs lui avaient demandé un véritable thriller, avec enquête, courses-poursuites, etc…, ce qu’il a refusé de faire.

    Que Bateman soit un véritable tueur n’a finalement aucune importance, puisque par essence, il suinte le mal et la volonté de revanche. Il y a une phrase que j’adore (la toute première de « Play it as it lays » de Joan Didion) : « What makes Iago evil ? some people ask. I never ask »

    Je ne veux pas savoir pourquoi Patrick Bateman est evil : je sais qu’il l’est.  Savoir s’il réalise son essence de tueur ou non, je laisse la question aux post-Sartriens…