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Avis sur Comportements primaires - Yannick Privat

 

Auteur : Yannick Privat
Titre : Comportements primaires
Editeur : Satori
Collection :
Année : 2001



Rien, apparemment, dans la vie de Marco ne nous intéresse. Il a vingt ans, débarque de la Martinique pour étudier la philosophie à Londres. Il dénonce l’inanité de la City, crache sur des temps modernes pourris jusqu’à l’os, vitupère contre les méfaits de la drogue et l’abrutissement télévisuel. Mais cultive la jouissance féminine en frénétique, couchant les corps dans son lit comme il essaime ses observations acerbes sur un monde délitescent. Rien de neuf sous le soleil, fut-il londonien ? Pourtant, sous le masque du dandy martiniquais «fils à papa» que d’aucuns lui prête facilement perce un visage tourmenté à la Dorian Gray. Meurtrissures, «mal du pays» ou remords, depuis peu des vertiges récurrents s’emparent de son corps obèse, le coupant de plus en plus de son entourage affectif et social.

C’est là, de fragment en fragment, dans les interstices d’un texte trop riche en vocabulaire pour être honnête, trop sexuel pour ne pas faire «tendance», que les "Comportements primaires" de Yannick Privat laissent entrevoir le vrai sujet du roman : une mise en boucle lancinante et corruptrice du concept de sujétion. Ou encore : comment définir ce qu’on est dans un univers qu’on hait jusqu’à son fondement . «Le monde dans lequel je vis, constate Marco, c’est le vôtre, dans toute sa perfection ; mesuré, dépecé, surveillé, mais aussi fragile et éphémère qu’un morceau de sucre dans un mauvais café. Nous existons pour rien. Nous attendons juste un mieux technologique pour certains fœtus attardés, et un agréable divin pour d’autres.» Qu’on se rassure, Marco, découvreur prométhéen des abysses de sa propre conscience sera rendu à lui-même.

Mais il devra pour ce faire payer le prix fort, loin de ses fantasmes post acnéens de la Whitney Houston des années 80 et du bagou créole avec lequel il ensorcelle ses conquêtes. Yannick Privat vient de la Martinique, il a 19 ans et ressemble furieusement à son anti-héros. Son récit, éructé couteau sous la gorge et publié par des éditeurs parmi les plus jeunes de France, mérite d’être lu comme il a été conçu : avec la douloureuse irréversibilité qui sied aux dérives de l’âme.

 

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